Scènes de la rue communarde – La Chanson au son du canon
le par Édouard Galby-Marinetti
La période de la Commune correspond à une restructuration discursive. En dépit de la censure et de l’interdiction répétée de journaux (dénoncées par Vallès), l’organisation communarde, régulièrement divisée en son sein, n’a pas freiné cette explosion de prise de parole, vraie polyphonie de la citoyenneté. Le vecteur de la chanson permet l’introduction de voix secondaires bousculant et déclassant les catégories littéraires. Familière des vues sur la polis, chambre d’écho de l’agora fractionnée en rues, en paysages sonores, la chanson échappe au magnétisme du café-concert, à ses fonctionnalités prescrites autour du divertissement surveillé et des frivolités morales affermis par l’Empire. Cela est rendu possible par sa faculté d’enchâssement des catégories discursives, de même que par sa simplicité spontanée à s’immerger dans le quotidien, à en exprimer le mélange d’habitude et de faits singuliers, d’éléments attendus et d’éléments vivants. Capture prompte des compositions du monde, elle enregistre ce dire des actes ordinaires et des faits d’exception. Elle transmet un double actualisme, celui de l’intime et de la singularisation, celui du général et de la mémoire collective.
Édouard Galby-Marinetti
Bibliographie
Labarthe Gustave, Le Théâtre pendant les jours du Siège et de la Commune, Fischbacher, Paris, 1910
Lissagaray Prosper-Olivier, Histoire de la Commune de 1871, Dentu, Paris, 1896
Maillard Firmin, Les Publications de la rue pendant le Siège et la Commune, Aubry, Paris, 1874
Mendès Catulle, Les 73 journées de la Commune, Lachaud, Paris, 1871
Villiers de L’Isle-Adam Auguste, « Tableau de Paris », O. C., t. II, Gallimard, Paris, 1986